Le décalage entre les résultats obtenus par le candidat Trump à la présidence et ceux obtenus par ses coreligionnaires aux autres élections fédérales confirme que chaque type de scrutin recèle une écologie électorale particulière, malgré de grandes ressemblances.
Dans la majorité des États en jeu pour le Sénat, le candidat républicain fait moins bien que D. Trump. Et si le manque à gagner varie d'un État à l'autre, la carte des différences de vote aux deux types de scrutin (ci-dessous) ne hiérarchise pas ces différences au point de pouvoir en tirer une règle générale; la différence existe davantage entre États que dans une hiérarchisation reconnaissable et se répétant dans chacun d'entre eux. À ce constat deux exceptions remarquables cependant. D'abord la Virginie, où l'on distingue parfaitement la banlieue de Washington, indifférente au type de scrutin sans doute parce que trop politisée pour varier son vote au gré des candidats, du reste de l'État où plus on s'éloigne de la grande ville, plus le candidat présidentiel surpasse les résultats obtenus par le candidat républicain à la sénatoriale — phénomène qu'on devine aussi dans le Minnesota par rapport à Minneaplolis - Saint-Paul. Et le Texas, où l'on reconnaît l'avance prise par le candidat Trump par rapport au candidat républicain au Sénat chez les Hispaniques du Rio Grande. Par ailleurs, la compétition sénatoriale permet ce que ne permet plus depuis longtemps la course à la Maison Blanche: l'émergence de candidats n'appartenant pas aux deux grands partis, comme c'est le cas depuis plusieurs scrutins pour Bernie Sanders dans le Vermont, contre qui le parti démocrate ne présente plus personne. Il est le plus connu des indépendants élus au Sénat américain.
Les élections à la chambre des Représentants sont beaucoup plus dissemblables, à la fois entre elles et comparativement à la présidentielle. Entre elles, au point qu'on devine fréquemment les limites de circonscription, qui se reconnaissent quand l'absence de concurrent important exagère mécaniquement le score du camp vainqueur jusqu'à le rendre presque étranger aux régions voisines. Et comparativement à l'électorat Trump, dans la mesure où les différences entre les deux électorats est beaucoup plus irrégulière qu'entre les électorat Trump et républicains pour le Sénat. Alors que dans ce dernier cas, sans discerner une loi générale, nous avions seulement quelques vastes zones à orientation identique, la carte des différences entre Trump et législatives montre des différences autrement réparties, et d'une façon générale nettement plus dispersées. Par ailleurs, même en enlevant les circonscriptions sans concurrent principal (en gris sur la carte), les pourcentages obtenus par les républicains dépassent bien souvent ceux de Trump, dans des zones où celui-ci avait fait mieux que les électeurs républicains du Sénat. Quoique la carte soit plus éclatée que la précédente, on arrive à distinguer le Nord-Est, les Rocheuses et l'Alaska d'une part, où Trump a fait mieux que les candidats républicains aux législatives, et le reste du pays (sauf circonscriptions isolées), où l'électorat républicain porte plus loin les candidats aux législatives. La région centrale du pays serait même davantage en pointe si y était cartographiées les circonscriptions sans concurrence réelle. Or, il s'agit de la région des États-Unis où les républicains règnent littéralement depuis plusieurs décennies; s'agirait-il d'une simple exacerbation du sentiment public, plus libre de s'exprimer aux législatives qu'à la présidentielle, plus corsetée, plus suivie par les médias nationaux, donc aux résultats plus homogènes?
Ces différences étaient beaucoup plus importantes jadis. Au XIXe siècle, les scrutins pouvaient être complètement étrangers les uns aux autres. Avec le temps, surtout depuis les années soixante, les électorats des différents types de scrutin ne cessent de se rapprocher.
